Le Kosovo est à nouveau en campagne électorale. Les élections anticipées du 11 juin prochain ont pourtant bien peu de chances de sortir le petit pays de la crise politique profonde qui le ronge depuis des années. Et la nouvelle majorité qui pourrait réunir tous les anciens commandants de la guérilla de l’UCK devra faire face à de bien difficiles dossiers.

Tout c’est passé le 11 mai, quand le Parti démocratique du Kosovo, le PDK, la formation du président de la République Hashim Thaçi, qui se présente comme l’héritier « officiel » de l’ancienne guérilla, a rompu l’alliance qui l’unissait avec la Ligue démocratique du Kosovo, la LDK, renversant le gouvernement. Le PDK a aussitôt abattu ses cartes, en annonçant la formation d’une grande coalition avec deux autres mouvements également issus de l’UCK : le petit parti de l’ancien commandant Fatmir Limaj, mais surtout celui de Ramush Haradinaj, à peine revenu au Kosovo après quatre mois en résidence surveillée en France, la Serbie ayant lancé contre lui un mandat d’arrêt pour crimes de guerre.

La justice française a refusé de l’extrader et Ramush Haradinaj a été accueilli en héros à son retour à Pristina. Il siégeait jusqu’à présent dans l’opposition, mais il s’est vu promettre le poste de Premier ministre en cas, probable, de victoire de cette « coalition des commandants ». Pour mettre toutes les chances de son côté, le PDK a d’ailleurs choisi une campagne extrêmement courte, afin de compliquer la venue de trop nombreuses missions internationales d’observation. La principale résistance devrait venir du mouvement Vetëvendosje, très à gauche, et organisateur de puissantes manifestations antigouvernementales ces dernières années.

Des dossiers délicats

Depuis deux ans, aucune décision politique importante n’a été prise. La libéralisation du régime des visas européens est ainsi bloquée en raison de la non-ratification de l’accord de délimitation de la frontière avec le Monténégro. De même, l’accord signé à Belgrade en août 2015 sur la création d’une Association des communes serbes du Kosovo, devant permettre une meilleure intégration de la minorité, n’a toujours pas connu le moindre début de mise en œuvre.

De plus, le tribunal spécial pour les crimes de l’ancienne guérilla de l’UCK, basé à La Haye, devrait lancer ses premières accusations dans les prochains mois. Beaucoup des anciens commandants qui dirigent déjà le pays ou aspirent à le diriger pourraient figurer sur la liste des inculpés. Enfin, la situation économique du pays est catastrophique, avec un chômage de masse qui touche près de la moitié de la population active, mais sur ce sujet, les candidats ne semblent pas avoir beaucoup de propositions à formuler.

La surenchère nationaliste, argument de campagne

Ramush Haradinaj, le probable futur Premier ministre, se distingue par ses déclarations extrêmement radicales. Cela promet des lendemains difficiles, notamment si l’Union européenne parvient à relancer le processus de dialogue entre le Kosovo et la Serbie, lui aussi en panne. A priori, on voit mal comment Belgrade pourrait accepter de discuter avec Ramush Haradinaj, toujours officiellement recherché par la justice serbe. Toutefois, après l’exaltation des temps de campagne électorale, les politiciens de la région savent très bien revenir à la bonne vieille realpolitik qui leur permet de conserver le pouvoir sans fâcher leurs protecteurs internationaux.

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